2010

Retour aux sources

Terre Mère, des vacances de voyage passées, principalement au Canada durant la période de la mousson qui se déroule de façon dramatique au Pakistan et au nord de l'Inde. Pourquoi des vacances de voyage ? Besoin de retrouver les siens, de se poser, se reposer, se refaire une santé.

Coup de coeur, je le préfère noir sans sucre, mais celui ci fut un vrai dessert, de retour à la Terre Mère ! Terrain connu par certains côtés mais des changements sautent au visage en reprenant le chemin des rencontres familiales et amicales. La joie profonde des retrouvailles. Le confort domestique simple et fonctionnel, les marchés du terroir, les librairies, les ballades nez au vent sans attirer l'attention, le distributeur automatique qui marche, le train à l'heure, le tarif affiché, la qualité et la diversité des produits, les rues sans amas d'immondices, les odeurs "normales" des transports publics, le papier dans les toilettes, pouvoir parler dans sa langue... La liste des signes d'un réel confort de vie est longue après ces mois passés en Asie centrale, en Inde, au Népal, au Tibet.

Qui l'emporte de la nature ou des déchets ? La pollution, l'environnement sont à l'ordre du jour ; thématique de riches ? Il s'agit de l'avenir de tous et cela interpelle profondément lorsqu'on constate au quotidien dans un grand pays émergent comme l'Inde à combien d'années lumières les choses en sont. Cela fait d'autant plus apprécier tous les efforts entrepris sur le sujet dans chaque pays rencontré, comme ici au Canada au bord du lac Rideau.




Au final de ce retour en Terre Mère, 15 heures séparent ces deux photos : la cathédrale Notre-Dame à Paris le 13 septembre, le mont Everest, juste avant d'atterrir à Katmandou, le lendemain.


Et 20 ans séparent les deux photos ci-dessus et ci-dessous. Un document exceptionnel, une photo prise par René de Bos, le 7 octobre 1990 du sommet de l'Everest, en contre bas Rombuk, où nous étions en juin dernier avec l'Everest à portée de main. René a été le premier néerlandais à avoir gravi l'Everest, l'année de ses 30 ans. (voir Liens). Vue d'en haut, vue d'en bas.

La maison, bienvenue !


Nous avons fréquenté plus d'une maison au cours des deux mois passés en Terre Mère canadienne. Une maison, un lieu ancré, stable, accueillant des nomades. On pose son sac, on se fait tout petit pour découvrir les lieux, les us et coutumes, les itinéraires, les gestes si familiers pour les autochtones, si neufs pour les hôtes de passage : entrer avec ou sans chaussures, comment éclairer l'escalier, faut-il fermer la porte avec un code, comment marche la douche, entre farenheit et celsius, à quel degré chauffer le four, où se trouve le thé, comment faire du café, y a t-il un alcool fort pour le Tiramisu, quel bac de recyclage utiliser, comment lire les messages téléphoniques, est-ce que le WiFi marche, peut-on écouter de la musique, où est le ruban de scotch, comment charger le lave-vaisselle ou brancher la télévision, dans quel magasin trouver les "recharges" utilisées habituellement par nos hôtes (lessive, kleenex, essuie-tout, alimentation...), car grand est le souci de respecter les lieux et les ressources. C'est aussi le plaisir de faire des bouquets, repasser son linge, marcher d'une pièce à l'autre, profiter du spa ou du sauna, de la piscine ou du lac, ...





Une maison, c'est en soi un pays à découvrir, un "territoire" qui ne se laisse pas deviner derrière un plan ou une "carte". Un pays avec ses reliefs, son mode d'emploi, sa langue, ses fragilités (attention à cette fenêtre, à ce robinet, à cette habitude). Une maison, en présence de ses maîtres, donne une pleine signature, elle est "entière", animée par ceux qui l'ont aménagée, parfois bâtie de leurs propres mains. Elle rit de voix familières, elle a l'accent de l'outaouais ou du québec. Ici, elle a les cheveux blancs et les murs roses. Là, elle est tout de vitres et de bois vêtue. Ailleurs, on ne la reconnaît pas car elle vient de subir un grand chambardement. Une maison est un livre d'histoire, un livre sans page.

J'ai passé trois jours dans un placard, du pur bonheur. Pas vrai ? mais si, j'ai compris au troisième jour d'où venait ce bonheur "spécial-placard" ! Ma grande soeur, avant de partir quelques semaines, me demande si je veux bien lui donner un coup de main dans l'appartement de notre défunte mère : "je ne retrouve plus rien dans ces placards débordants, je ne sais pas ce qu'il faut liquider ou pas, si tu t'en occupais cela me ferait très plaisir"... très volontiers, chère soeur. Je réserve trois journées pleines... pour faire le vide. J'ai vidé les placards, trié, jeté, mis de côté, emballé, étiqueté, rangé, nettoyé, recouvert d'un l'adhésif clair ces antres que j'avais couvertes vingt ans auparavant d'un papier de ménage comme on dit à Genève. C'était le choix de ma petite mère : un papier à carreaux colorés. Je dois avoir une spécialité familiale reconnue en la matière. Lampe frontale allumée, escabeau pour les hauteurs, contorsions multiples pour fixer l'adhésif sans faux plis. Ce fut le plaisir d'un travail manuel à résultat immédiat, le silence ambiant propice aux vagabondages personnels, le défi d'avoir fini, en beauté, au moment de reprendre le train, le cadeau à la grande soeur, la veille de ses 70 ans. Avec quelques belles rencontres, dans l'ordre d'arrivée : Ahmed, Inès, Martin et Vesna puis Catherine et Alain. Plaisir de se voir, sans pouvoir revoir tous ceux qui me tiennent à coeur. Clin d'oeil à tous... et grand rire partagé avec Jocelyne qui saura pourquoi !

Nourritures

Qu'est ce qui vous nourrit ? de la diversité, très certainement, en voici...

Il en est d'essentielles, la plus surprenante, la voici... nous avons mangé Pgaz ! Merci à la bande de la GORPAO, les fidèles d'entre les fidèles, soudés comme pas possible..." nous vieillissons ensemble", bravo les gars ! et quel plaisir de mieux connaître vos moitiés !




Au rayon alimentaire, des choix impressionnants dans les magasins et quelques recettes lorsqu'il m'a fallu relever le défi de la cuisine à la française : poulet basquaise, tarte aux pignons et épinards, rillettes de maquereaux, caviar d'aubergines, mousse au chocolat... et tiramisu.
Je vous en livre une, celle du tchaï népalais. Pour deux grandes tasses de thé, faire bouillir l'eau équivalente avec 3 graines de cardamone, 1 clou de girofle, une pincée de cannelle moulue. Après quelques minutes ajouter 1 cuillère à soupe de thé noir plutôt fort et 3 cuillères à soupe de lait en poudre (ou équivalent liquide), cela va gonfler dans la casserole. Quelques bouillons plus tard, on peut ajouter du sucre selon goût (2 à 3 cuillères à soupe), filtrer à la passoire et servir.

Nourritures intellectuelles, avec des livres qui se goûtent jusqu'à la dernière page :
Le tombeau d'hiver, Anne Michaëls aux éditions Afto
Ritournelles de la faim, JMG Le Clézio en Folio
Le Tao du vélo, Julien Leblay aux éditions Transboréal
Pauvres en droits, Irène Khan, aux éditions Max Milo
Bouthan, royaume hors du temps, Robert Dompnier en Picquier Poche
Pas si fous ces Français, JB Nadeau et J Barlow, Le Seuil, collection Points
Des articles de fond sur la nationalité, comment elle se construit de Patrick Weil, etc
La lecture du Courrier International, du Monde, de l'Actualité, un hebo québécois super intéressant...
L'écoute musicale de morceaux nouveaux chez les amis...

Et, dans un tout autre registre, à Sainte Lucie des Laurentides, Enracinement, une session de travail personnel. Maurice Clermont (qui intervient aussi en France et en Belgique) anime ces six jours en pleine nature, et quelle nature, pour renouer avec l'essentiel, une sacrée nourriture !







Côté ouest : Victoria

Montréal-Victoria, une traversée aérienne du pays d'est en ouest : Montréal avec le stade Olympique et le mont Royal, les plaines, les Rocheuses puis la multiplicité des îles avant d'atteindre Victoria.








Victoria, capitale de la Colombie Britannique, sur la grande île de Vancouver, en face de la ville éponyme. Un charme certain, lieu de villégiature reconnu, étape pour les croisières remontant vers l'Alaska... Nous venons passer quelques jours chez la fille de Jacques et son mari. Ballades le long du Pacifique, tout en moto, camping à la Baie des Français, oui !









Côté est : Quebec ontario


Ottawa, capitale fédérale, chaque soir une projection anime la façade du Parlement. Au programme, la construction du Canada. Vivre ensemble et s'exprimer. Un large kaléidoscope humain de jeunes et d'anciens, d'hommes et de femmes de différentes origines, ils témoignent, en direct, de la diversité canadienne.






Un lieu original dédié aux arts, le Centre Shenkman, près d'Ottawa dirigé par Christine, une tonique visionnaire qui a été au bout de son rêve et de ses convictions.

Les grands édifices du centre urbain, le château Laurier, mais aussi les lacs des nombreux parcs, le canal Rideau, le Canada de l'Ontario.






Moments familiaux, tu te souviens des 10 jours passés en canot au parc de la Vérendrye ? j'ai encore la carte, dit le fils qui sera bientôt papa et Jacques... grand père ! Les trois concernés : Daniel, Isabelle et bébé.


Mais aussi Montréal au pied de l'oratoire Saint Joseph, l'accueil de Kathleen et de superbes murs peints, les fermes et maisonnettes de l'île d'Orléans près de Québec...









Mère nature avec ses hérons, ses castors, ses huards au chant si poignant...





LA question, réponse autère !

(*)
LA question, celle qui nous est posée si souvent... comment faites-vous pour vivre ensemble 24h sur 24h en voyage depuis tant d'années dans un espace si réduit ? L'amour ??? Oui, oui, oui mais pas seulement ! Eh bien, après avoir interrogé Jacques et réfléchi de mon côté, voici cinq éléments porteurs.

Un projet fortement partagé, appuyé par les trois A : appétit de découverte, accepter des conditions de vie sommaires, assainir ses peurs. Chacun des deux a envie de découvrir un bout du monde, même si nos centres d'intérêts sont parfois différents. Devenir nomade, c'est accepter dans la durée des conditions de vie aléatoires, bien moins confortables, stables et assurées qu'à la maison. Assainir ses peurs signifie d'avoir "ouvert la boîte à peurs", si j'ai peur de l'inconnu, tout étant inconnu, je ne peux même pas partir de chez moi, donc si une "peur" surgit, vite ouvrons la boîte : de quoi ai-je peur concrètement ?
Une solidité personnelle, sorte d'hygiène de vie, de discipline intérieure visant à gérer par soi-même son état quotidien. Chaque matin démarrer la journée de bonne humeur ou au moins au point neutre. Prendre soin de sa santé physique, émotionnelle et mentale, relier le corps, le coeur et l'âme. Se recentrer sur les essentiels, pratiquer la méditation par exemple (ou yoga, taï-chi, arts martiaux...), écouter la petite voix intérieure. Ne pas laisser la fatigue prendre le dessus. Cultiver la patience, la tolérance mais ne pas tolérer ce qui menace ou détruit l'équilibre personnel. L'attention envers soi mais aussi envers l'autre : comment va t-il ? y a t-il des signes de risques liés à un trop plein de fatigue, d'émotions, de tensions ?... dédramatiser résolument, pratiquer l'humour aussi souvent que possible.
Entretenir le contact, le dialogue, déjà entre nous deux au fil des jours : met-on des mots sur nos ressentis ? a t-on vidé la boîte à non-dits ? comment se dire les choses lorsque les mots viennent difficilement ? si la parole est difficile, alors écrivons.
Contacts et dialogue avec nos proches : comment vont-ils ? que vivent-ils en ce moment ? qu'est ce qui s'annonce dans leur environnement ? comment leur faire part de ce que nous vivons à distance ? Ne pas inquiéter inutilement si les choses, de loin, peuvent sembler alarmantes comme par exemple, le seul fait de voyager en Colombie, en Iran, au Pakistan peut susciter de la crainte.
Contacts et dialogue sur la route, avec les locaux rencontrés. C'est un de mes trois ressourcement en voyage. La rencontre, l'échange, la découverte des gens en chemin. Parler lorsque la langue commune le permet, passer un moment ensemble pour découvrir une activité en cours, partager une tâche, rire de mes maladresses de grande débutante si je ne tamise pas la semoule aussi vite ou si je ne pèle pas les betteraves de la bonne façon ! S'asseoir ensemble au soleil, jouer avec les enfants, gonfler des petits ballons et se les renvoyer à la cantonnade... que vivent-ils ? comment font-ils face chaque jour ? quel est l'avenir des enfants ? quels sont leurs talents, comment réussissent-ils ces objets, ces travaux...? Tout m'intéresse ! Le regard, l'attention, l'observation servent aussi de dialogue lorsque le contexte est limpide, sans autre enjeu que celui de la rencontre de personne à personne. Rencontres aussi bien sûr avec d'autres voyageurs ! Parfois ce sont quelques instants ou quelques heures, mais l'intensité de l'échange s'inscrit au plus profond dans le coeur. Je peux décrire très précisément les moments passés avec tel ou tel voyageur il y a deux, trois ou quatre ans, moments qui ont initié un lien fort, très fort.
Transformer les différences en complémentarités : tout nous oppose, tout peut être source de difficulté et il faut construire avec ce "tout" si explosif ! Un homme, une femme. Un canadien, une française. Un sportif avéré, une marcheuse du dimanche. Un amateur de café, bière, spaghettis, bacon... au sirop d'érable et une amatrice de thé, parfois vin, riz, desserts...et chocolat. Un conducteur tout terrain, une conductrice d'asphalte. Un ascète, une épicurienne. Donc... comment s'en sortir dans un espace si réduit avec un programme si commun puisque nous voyageons de concert ? Nous avons défini des territoires, territoires de deux sortes : territoires physiques (mon casier, ton casier de rangement) et territoires de compétences ou responsabilités (le véhicule, les papiers, la nourriture, l'entretien, les relations extérieures, comme demander son chemin, parler à la police...). Etre responsable, signifie que l'autre ne va pas interférer, même s'il aurait bien volontiers proposé une solution différente ! L'autre laissera faire ou se mettra en posture de main-d'oeuvre disponible s'il sent que cela peut aider positivement.
La limite du "territoire" est l'indispensable polyvalence pour se relayer, s'épauler, s'entraider... Il faut conserver un entraînement effectif pour être capable d'assurer la "relève-minute" en cas de besoin ! La seconde limite serait le trop plein de charge perçu comme tel : si je prépare l'itinéraire, comment y participes-tu ? L'un reporte sur la carte-papier les informations clés du LP (guide Lonely Planète), l'autre recherche des informations plus sociologiques. Encore faut-il se rencontrer et confronter les points de vue !
Attitudes et qualités, en vrac : enthousiasme et capacité d'étonnement, pragmatisme, endurance, attention et vigilance dans la durée, confiance en soi et dans l'autre, ouverture d'esprit et curiosité, patience, tolérance, très grande tolérance entre nous, vis-à-vis des autres personnes, cultures, mentalités, réactivité pour saisir des opportunités ou réduire un risque, connaître, très concrètement, ce qui ressource personnellement et surveiller les seuils avant l'alerte rouge ! Mes trois principaux ressourcements : le contact humain déjà évoqué plus haut, vivre dans la nature, contempler la beauté qu'il s'agisse d'un édifice, de montagnes, d'espaces, d'objets, de savoir-faire, d'animaux, de tissus, de couleurs, de jeux de lumières.... Je prends conscience d'un quatrième ressourcement, l'écriture photographique, écrire et photographier, relier textes et photos.

Post scriptum 1, en pleine conscience d'inachevé, il faudrait compléter ce descriptif des écueils et risques majeurs. Je veux évoquer la fatigue, cette fatigue qui s'installe sans qu'on la mesure nettement, s'insinue et grignote comme une chenille. Le risque peut aller dans plusieurs directions : lassitude de la découverte, repli sur soi, usure relationnelle oubliant les basiques de la communication, vigilance émoussée, somatisation...
Post Scriptum 2, en guise de conclusion : ces cinq éléments ont été efficaces jusqu'à présent, mais la formule peut évoluer. Alors, laissons ouverte la réponse à la question initiale et attendons les réactions. Qui commence ?
(*) Claude et Sue reconnaîtront leur soleil, mais peut être pas la chenille-soleil !

400 jours, Josée Grandmont


400 jours en famille avec trois adolescents, sur la route des Amériques.
Josée Grandmont vient de terminer la rédaction de deux livres sur leur voyage familial : un récit et un recueil de photos commentées qui sortent en octobre 2010. Partis de l'Avenir, un petit village québécois près de Drumondville, ils ont visité l'Amérique centrale et l'Amérique du sud. Nous les avons rencontrés à Rio de Janeiro en mai 2008, nous dormions sur le même parking au pied du Pain de sucre ! www.enroutepourlesameriques.ca



Belles discussions entre nos journées de découverte à pied dans la grande cité brésilienne. Cela leur donnera l'idée de remonter par le fleuve Amazone plutôt que par la route. Plus tard, nous les retrouvons chez eux au Québec. Dans le bois, ils ont construit l'an passé un chalet en rondin et une cabane à sucre, ils préparent leur sirop d'érable sur place. Camille, Jérôme et François avancent dans leurs études... bientôt de nouvelles perspectives de voyage pour les parents ? La famille au complet en août 2010.